dimanche 10 juillet 2016

"Rien ne s'oppose à la nuit" de Delphine de VIGAN

"Aujourd'hui, maman est morte." Voici l'incipit bien connu de "l'Étranger "d'Albert Camus. 
Celui de Delphine de Vigan : "Ma mère était bleue, d'un bleu pâle mêlé de cendres, les mains plus foncées que le visage, lorsque je l'ai trouvée chez elle, ce matin de janvier."

La comparaison s'arrête là mais à mon avis elle n'est pas anodine.


A la suite à cette macabre découverte, elle décide de nous raconter sa mère.

Un livre autobiographique bouleversant.
 
 

"J'écris ce livre parce que j'ai la force de m'arrêter aujourd'hui sur ce qui me traverse et parfois m'envahit, parce que je veux savoir ce que je transmets, parce que je veux cesser d'avoir peur qu'il nous arrive quelque chose comme si nous vivions sous l'emprise d'une malédiction, pouvoir profiter de ma chance, de mon énergie, de ma joie, sans penser que quelque chose de terrible va nous anéantir et que la douleur, toujours, nous attendra dans l'ombre. "

"Quelques années plus tôt, au père de mes enfants qui me reprochait d'être dans la fuite en avant (...), j'avais répondu pompeusement que j'étais dans la vie."

"Désormais la mort d'Antonin ne serait plus qu'une onde souterraine sismique, qui continuerait d'agir sans aucun bruit."

"Le noir de Lucile est comme celui du peintre Pierre Soulages. Le noir de Lucile est un Outrenoir, dont la réverbération, les reflets intenses, la lumière mystérieuse, désignent un ailleurs.
Lucile est morte comme elle souhaitait: vivante. Aujourd'hui, je suis capable d'admirer son courage."

"Un jour Lucile partirait, elle quitterait le bruit, l’agitation, le mouvement. Ce jour-là, elle serait une seule, distincte des autres, ne ferait plus partie d’un ensemble. Elle se demandait souvent à quoi ressemblerait le monde, ce jour-là, s’il serait plus violent, ou au contraire plus clément. "

"Je veux mourir vivante "

"J'ai pensé qu'être adulte ne prémunissait pas de la peine vers laquelle j'avançais, que ce n'était pas plus facile qu'avant, quand nous étions enfants, qu'on avait beau grandir et faire son chemin et construire sa vie et sa propre famille, il n'y avait rien à faire, on venait de là, de cette femme; sa douleur ne nous serait jamais étrangère. "

« Lucile nous a laissé ce doute en héritage, et le doute est un poison. »

"Lucile était devenue une toute petite chose friable, recollée, rafistolée, irréparable en vérité.
De toutes les images que j'ai gardées de ma mère, celle-ci est sans doute la plus douloureuse. "

"Sans doute avais-je envie de rendre un hommage à Lucile, de lui offrir un cercueil de papier - car, de tous, il me semble que ce sont les plus beaux - et un destin de personnage. "

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