samedi 11 janvier 2020

"Le reste de leur vie" de Jean-Paul Didierlaurent



On pourrait penser que je ne fais pas dans la littérature légère en ce moment... Après "Changer l'eau des fleurs" sur une garde-cimetière, voici "Le Reste de leur vie" sur un thanatopracteur, une grand-mère, une auxiliaire de vie et un vieillard malade ! Et pourtant, rien de morbide ! Plutôt un étonnant road trip poétique qui fait aimer la vie et ses petits plaisirs. A lire absolument !

Quelques jolis passages ; 

"L'homme avait une tête de bon vivant. Il allait falloir être sur ses gardes. Pour l'avoir constaté à maintes reprises, les bons vivants faisaient souvent de mauvais morts."

"L'ennui peut être une souffrance, vous savez. Ça s'installe sournoisement avant de venir hanter vos jours et vos nuits comme une douleur sourde. Ça vous lance par moments à vous faire pleurer avant de refluer, ça va ça vient, mais au final, vous êtes obligé de faire avec parce que l'ennui à quatre-vingt-quatorze ans n'est pas le même que lorsqu'on en a vingt. Il a de la place pour s'installer, se faufile entre nos souvenirs et nos regrets, remplit les vides. C'est une noyade qui ne prend fin qu'avec le dernier souffle."

"Tandis que la pluie redoublait de violence, la jeune femme se promit qu'à défaut d'avoir su donner la vie, elle allait tout faire pour essayer de repousser la mort."

"L'amour c'est comme les bonbons. Ce n'est pas en les regardant qu'on les apprécie."

"Le pilulier semainier est l'agenda des vieux."







samedi 4 janvier 2020

"Changer l'eau des fleurs" de Valérie Perrin



Après "Les Oubliés du dimanche", Valérie Perrin nous entraîne dans la vie très émouvante de Violette Toussaint, garde-barrière puis garde cimetière. On peut penser que tout cela n'est pas très gai certes mais c'est un roman merveilleux, très poétique et inclassable d'une vie ordinaire remplie d'histoires extraordinaires. 
Un de ces romans qui laisse des traces indélébiles. 

Quelques phrases qui résonnent chez moi :

"Il m'a regardée comme si j'avais perdu la raison. En 1997, il me regardait chaque jour comme si j'avais perdu la raison. Est-ce qu'un homme qui ne l'aime plus regarde la femme qu'il a aimée comme si elle avait perdu la raison."

"Les mots tus s'en vont hurler au fond de nous. Mais moi, j'étais pleine de silences qui hurlaient au fond de moi. Qui m'ont fait grossir, maigrir, vieillir, pleurer, dormir toute la journée, boire comme un trou, me cogner la tête contre les portes et les murs. Mais j'ai survécu."

"En me couchant, je pense que je n'aimerais pas mourir au milieu de la lecture d'un roman que j'aime."

"Il y a plus fort que la mort, c'est le souvenir des absents dans la mémoire des vivants."

"Tu n'es plus là où tu étais mais tu es partout où je suis."

"Toute notre vie, on rencontre des grands qui nous apprennent que le Père Noël n'existe pas. On trébuche sur des déceptions."

"Je referme le journal d'Irène le coeur lourd. Comme on referme un roman dont on est tombé amoureux. Un roman ami dont on a du mal à se séparer, parce qu'on veut qu'il reste près de soi, à portée de main."

"En réparant des moteurs, il s'était réconcilié avec l'envie."

"Son oncle Luc lui disait que quand on pleure du nez, c'est qu'il prend le relais parce que la jauge des yeux déborde."

"Je nage un long moment, je n'ai plus envie de sortir, comme à chaque fois. (...) Rien n'est plus salvateur que ce lieu du monde où tout est beau, où les éléments réparent les vivants. Il fait chaud, le sel brûle mon visage, mes lèvres plus encore. Je mets la tête sous l'eau, je nage en fermant les yeux, j'adore deviner, écouter le mer en dessous."